L'OCEMO interroge la jeunesse marocaine
Interview de Michèle Mansuy, administratrice de l'Insee et responsable de études statistiques au sein de l'Ocemo
Ocemo : En quoi consiste cette enquête et quels sont ses objectifs ?
Michèle Mansuy : « 1 300 jeunes de la région de Marrakech Tensift Al Haouz (MTH) ont répondu à cette enquête entre février et mai 2013. Il s'agit d'une première enquête que nous espérons pouvoir dupliquer afin de connaître les attentes de la jeunesse et de proposer des solutions adaptées ».
Ocemo : Comment cette enquête a-t-elle été perçue ?
Michèle Mansuy : « Très bien car il s'agit de la première enquête régionale sur les jeunes au Maroc. Elle permet de combler un réel déficit en informations. Sur le terrain, nous avons constaté une très forte adhésion des jeunes avec un taux record de réponse de 94% ».
Ocemo : Quels enseignements tirer de cette enquête ?
Michèle Mansuy : « Il existe une fracture territoriale entre milieu urbain, milieu rural enclavé et milieu rural plus proche des villes. Elle touche particulièrement les jeunes femmes et constitue un frein au développement. 25% des jeunes interrogés ne sont jamais allés à l’école ou presque. C’est le cas de 1% des jeunes hommes et de 12% des jeunes femmes en milieu urbain. Ces taux passent respectivement à 23% et 48% en milieu rural proche, à 36% et 57% en milieu rural enclavé. Globalement, les jeunes des milieux ruraux n'ont pas accès au français ou à l'anglais, ni aux technologies de la communication. Ils ne peuvent donc pas évoluer professionnellement.
Une gr ande majorité des jeunes (75%) déclarent vouloir accéder à un emploi ouvrant des droits à un système de protection sociale. 39% des jeunes interrogés qui occupent un emploi sont des aides familiaux, sans salaire ni couverture sociale. Près de 90% ne bénéficient ni de sécurité sociale, ni de mutuelle. 69% des jeunes salariés déclarent que leur employeur appartient au secteur informel ».
Ocemo : Cette enquête aura-t-elle une suite ?
Michèle Mansuy : « Nous proposons de valoriser la base de données OCEMO par sa mise à la disposition de la communauté scientifique. La création d'un observatoire régional de la jeunesse à Marrakech est en discussion avec les partenaires de cette région. Enfin, la transposition de la démarche une autre région du Maroc est à l’étude ».